• Avant la Covid, Lufthansa, British Airways et Air France étaient les compagnies aériennes les plus polluantes d’Europe

    D’après les données officielles, Lufthansa, British Airways et Air France – qui comptent parmi les principaux bénéficiaires des aides versées au secteur aérien – étaient les trois compagnies les plus polluantes d’Europe avant que la pandémie ne cloue leurs avions au sol [1]. La divulgation du total des émissions de CO2 des compagnies aériennes européennes est un fait inédit. Les ONG Transport et Environnement (T&E) et Carbon Market Watch (CMW), qui ont obtenu les données compilées par les gouvernements, les diffusent un an tout juste après l’approbation par la Commission européenne des mesures de soutien au secteur aérien à la suite de la pandémie. C'est d'ailleurs la France qui a été la première en Europe à en faire bénéficier ses compagnies, avec un Moratoire sur le paiement de taxes et redevances aéronautiques.

    Pour la première fois, T&E et CMW ont obtenu des données au sujet de la pollution liée aux vols entrants et sortants d’Europe, et ont pu calculer le total du CO2 émis par les compagnies aériennes. Cela a permis d’identifier les compagnies aériennes dont la majorité de la pollution provenait des vols longs courriers.

    Andrew Murphy, responsable de l’aviation chez T&E, a déclaré : « Un tiers des subventions aux compagnies aériennes est attribué aux trois transporteurs les plus polluants. Après avoir passé les 12 derniers mois à les abreuver d’aides, les gouvernements doivent changer leur fusil d’épaule et se concentrer sur l’écologisation du secteur. Il faut imposer aux compagnies aériennes de payer pour les émissions sur tous leurs vols, et de commencer à utiliser des carburants plus propres. »

    Les données montrent que les compagnies aériennes ne paient pas pour la majeure partie de leur pollution, étant donné que les vols qui entrent en Europe et qui en sortent sont actuellement exemptés de la compensation carbone de l’UE. Dans le cas de Lufthansa, de British Airways et d’Air France, les compagnies ne déboursent pas un centime respectivement pour 77 %, 86 % et 83 % de leurs émissions. En juin, la Commission européenne décidera si les vols qui entrent en Europe et qui en sortent doivent être soumis au marché carbone ETS de l’UE. Elle proposera également une loi exigeant que les compagnies aériennes commencent à utiliser des carburants plus propres, comme le kérosène de synthèse.

    En 2008, l’UE a tenté d’ajouter l’aviation long-courrier à son ETS, mais la pression du secteur a débouché sur l’exclusion des vols entre pays de l’UE et pays hors UE, afin de « créer de l’espace » pour un accord de l’ONU sur le CO2 émis par les compagnies aériennes. Une étude de l’UE publiée la semaine dernière révèle que le système de l’ONU, connu sous le nom de CORSIA, pourrait dans les faits saper les efforts climatiques européens, et qu’il est « peu probable qu’il modifie réellement » l’impact climatique de l’aérien.

    Gilles Dufrasne, chargé des politiques de Carbon Market Watch, a déclaré : « CORSIA n’est qu’une manière de faire en sorte que l’aviation conserve son statu quo. L’UE ne doit pas le tolérer, il faut qu’elle résiste à la pression du secteur qui appelle à démanteler l’ETS européen. Nous devons mettre fin aux exonérations dont bénéficient actuellement les compagnies aériennes, y compris la libre distribution de permis de polluer. Remplacer les politiques existantes par CORSIA aurait exactement l’effet inverse. »

    Malgré de multiples demandes, le gouvernement italien n’a fourni aucune donnée. Aussi les émissions totales de la compagnie Alitalia restent-elles inconnues.

    Note aux éditeurs :

    [1] C’est la première fois que les émissions de CO2 internationales des grandes compagnies aériennes européennes – des vols externes et internes à l’Europe – sont rassemblées. T&E a obtenu l’accès aux donnés des émissions internationales par plusieurs gouvernements de l’EEA, mais l’Italie et la Roumanie n’ont pas fourni de données. Ryanair reste le plus grand pollueur en vol au sein de l’Europe.

    Pour en savoir plus :

    Briefing: One year of airline bailouts – what have we learned?