Pour y arriver, il faudra également déployer une stratégie industrielle ambitieuse. Si ces deux conditions ne sont pas remplies, le secteur automobile européen risque de perdre un million d’emplois et deux tiers des investissements prévus dans les batteries.
Selon une nouvelle étude de T&E, l'industrie automobile européenne pourrait revenir à une production de 16,8 millions de voitures par an en 2035 - égale à son niveau de 2016- contre 12,9 millions en 2024. Pour cela, l'UE doit maintenir son objectif de 2035 pour les voitures, tout en renforçant les politiques industrielles et de soutien à la demande. Cela permettrait également de maintenir les emplois de la chaîne de valeur de l'industrie automobile à leur niveau actuel.
Le rapport a modélisé l'impact du maintien de l'objectif zéro émission de l'UE en 2035 et de la mise en œuvre de nouvelles politiques industrielles afin de stimuler la production de voitures électriques. Ces politiques peuvent par exemple fixer des objectifs d'électrification pour les flottes d'entreprises et prévoir un soutien aux voitures et aux batteries fabriquées dans l'UE. Dans ce scénario, la contribution de la chaîne de valeur automobile à l'économie européenne augmenterait de 11 % d'ici 2035 par rapport à aujourd'hui.
La France est bien placée pour capter une partie de cette manne : les investissements dans la chaîne de valeur des voitures électriques (incluant les batteries ou encore le raffinage du lithium) pourraient atteindre 25 milliards d’euros, à condition que l’objectif 2035 soit maintenu et que les politiques industrielles soient mises en oeuvre.
La perte d'emplois dans la construction automobile pourrait être compensée par la création de plus de 100 000 nouveaux emplois dans la fabrication de batteries d'ici à 2030 et de 120 000 emplois dans la recharge d'ici à 2035, selon l'étude. L'UE pourrait produire jusqu'à 900 GWh de batteries par an (contre 187 GWh actuellement) d'ici à 2030 si elle tient bon sur ses objectifs de réduction des émissions et met en œuvre des stratégies industrielles de soutien. L’activité économique du secteur de la recharge pourrait être multipliée par cinq pour atteindre 79 milliards d'euros d'ici à 2035.
Mais si l'objectif zéro émission est affaibli - comme réclamé par certains lobbys - et que les politiques industrielles adéquates ne voient pas le jour, alors le tableau sera bien plus sombre. Dans ce scénario, un million d’emplois pourraient disparaître. La contribution de la chaîne de valeur de l'automobile européenne à l'économie européenne pourrait diminuer de 90 milliards d'euros d'ici 2035. Jusqu'à deux tiers des investissements prévus dans les batteries produits en Europe pourraient également être perdus, tandis que l'industrie de la recharge serait privée de 120 milliards d'euros de recettes potentielles au cours des dix prochaines années.
Diane Strauss, directrice de T&E France, explique : « C'est un moment décisif pour l'industrie automobile européenne, car la concurrence mondiale pour la production de voitures électriques, de batteries et de chargeurs est intense. Le succès de l'Europe dépend de la voie choisie aujourd'hui par les responsables politiques de l'UE. Le maintien de l'objectif de zéro émission en 2035 et l'adoption de politiques industrielles et de demande fortes constituent la meilleure chance pour l'UE de revenir à une production automobile plus importante, de maintenir les niveaux d'emploi et d'augmenter la valeur économique de son industrie automobile ».
Afin de réussir, l'UE doit prioriser les voitures électriques dans ses politiques climatiques et industrielles. Pour cela il faut :
Maintenir les objectifs 2030-2035 pour les émissions de CO2 des voitures lors de la prochaine révision réglementaire, accompagné de mesures européennes pour soutenir la demande.
Introduire des aides nationales et européennes à la production pour les batteries de voitures électriques, ainsi que des incitations à s'approvisionner en composants et matériaux fabriqués dans l'UE.
Mettre en œuvre le règlement de l'UE sur l'infrastructure pour les carburants alternatifs (AFIR), les réformes du marché de l'électricité et les plans d'action pour les réseaux afin d'accélérer le déploiement des chargeurs, les raccordements au réseau et l'octroi des autorisations.
Conditionner le soutien à la production à la création d'emplois de qualité et renforcer les dispositions relatives au transfert de technologies et de compétences lorsque des investissements étrangers sont réalisés en Europe.
Trois associations industrielles ont étudié le rapport. Elles soutiennent son message global sur le potentiel économique et d'emploi de la transition vers le véhicule électrique en Europe - qui nécessite à la fois des objectifs stables et des politiques industrielles et de demande plus fortes - sans pour autant approuver tous les aspects du rapport :
Chris Heron, Secrétaire général de E-Mobility Europe, déclare: « L'Europe peut créer des centaines de milliers d'emplois dans le cadre de la transition vers les véhicules électriques, mais elle doit pour cela faire preuve de courage politique et d'esprit de décision. La course mondiale au leadership dans le domaine des voitures électriques est déjà lancée, et nous ne pouvons pas laisser d'autres régions se mettre hors de portée. L'Europe doit rester convaincue de son objectif 2035 pour guider les investissements dans les véhicules électriques, les batteries, les matériaux et la recharge. Mais elle a également besoin d'un renforcement tangible de ses politiques industrielles et de demande, afin de prouver aux entreprises qu'elle est vraiment sérieuse. »
Ilka von Dalwigk, Directrice générale de RECHARGE, déclare: « Cette étude fait écho à la mise en garde faite depuis longtemps par les leaders de l'industrie : l'Europe risque de perdre l'un des secteurs les plus stratégiques de la transition verte. La remise en question par l'UE de l'objectif de 2035 et l'absence de programmes de soutien efficaces pour la production de batteries mettent en péril l'une des industries les plus importantes dans le domaine des technologies propres. Cette étude confirme que si nous agissons rapidement, nous pouvons garantir des centaines de gigawattheures de batteries propres fabriquées localement. »
Lucie Mattera, Secrétaire générale de ChargeUp Europe, déclare: « La transition énergétique est un catalyseur pour la compétitivité de l'Europe, car elle stimule l'innovation, l'investissement et les nouvelles opportunités. Le secteur des infrastructures de recharge joue un rôle clé dans cette transformation et est en passe de créer de la valeur à long terme et une série d'emplois de qualité sur tout le continent. Pour réaliser pleinement ce potentiel, des conditions réglementaires stables et prévisibles telles que l'objectif 2035 sont essentielles.»
A propos de T&E
T&E est l'organisation européenne de référence sur la décarbonation des transports et de l'énergie. Cette organisation à but non lucratif veut changer la façon dont les transports sont alimentés, en accélérant la transition vers des systèmes de mobilité et d'énergie à zéro émission, abordables et ayant un impact minimal sur notre santé, le climat et l'environnement.
A propos de E-Mobility Europe
E-Mobility Europe est la voix collective de l'écosystème des véhicules électriques en Europe (ex AVERE), dont les membres comprennent des associations nationales de véhicules électriques, des fabricants de véhicules, la chaîne d'approvisionnement, des propriétaires de flottes et des fournisseurs de technologie. E-Mobility Europe plaide pour une transition réussie de l'Europe vers les véhicules électriques, d'une manière qui profite à la fois aux habitants et aux industries du continent.
A propos de RECHARGE
RECHARGE est l'association industrielle européenne pour les batteries rechargeables avancées et les batteries au lithium. Fondée en 1998, notre mission est de promouvoir les batteries rechargeables avancées en tant que technologie clé qui contribuera à une économie plus autonome, durable et circulaire en permettant la décarbonisation de l'électricité et de la mobilité, ainsi que des produits de consommation de pointe. Les membres de RECHARGE couvrent tous les aspects de la chaîne de valeur des batteries rechargeables avancées : des fournisseurs de matières premières primaires et secondaires aux fabricants de batteries et d'équipements d'origine, en passant par les partenaires logistiques et les recycleurs de batteries.
A propos de ChargeUp Europe
ChargeUp Europe est l'association industrielle du secteur des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (VE). Notre association s'efforce d'accélérer le passage à la mobilité zéro émission et de faire en sorte que les conducteurs de VE puissent bénéficier d'une expérience de recharge fluide grâce à l'accès à des infrastructures de recharge de haute qualité et facilement disponibles dans toute l'Europe. À ce jour, nos entreprises membres sont actives dans les 27 États membres de l'UE, au Royaume-Uni et dans les pays de l'AELE.
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