La remise sur le carburant qui passe à 10 centimes d'euros mi-novembre va renchérir le coût du plein d'essence, ce qui va accroître le fossé avec le coût de la recharge électrique. Celle-ci reste - de loin - l'énergie la moins chère pour une voiture, malgré l'augmentation du prix de l'électricité.
Même si une voiture électrique coûte souvent plus cher à l’achat qu’une voiture essence ou diesel, son coût d’utilisation est en revanche bien inférieur à ces dernières. Ce fait irréfutable a été bousculé par la crise de l’énergie et aujourd’hui 61% des Français pensent que le plein d’une voiture électrique coûte le même prix qu’un plein d’essence. A tort.
En menaçant de fermer les robinets de gaz et de pétrole qui alimentent le continent, la Russie a agité la peur d’un hiver rude pour les Européens et les prix des carburants sont partis à la hausse. La crise a aussi fait exploser les prix de l’électricité sur le marché, car ceux-ci sont indexés sur le prix de production des centrales électriques fonctionnant au gaz.
Les hausses ont été largement contenues par le bouclier tarifaire sur les prix régulés de l’électricité et du carburant. De nombreux pays européens ont fait le choix de maintenir artificiellement bas le prix de l’essence et du diesel après l’invasion de l’Ukraine et le désordre qu’elle a provoqué sur les marchés de l’énergie. En France, ces aides représentent 7,5 milliards d’euros d’argent public en 2022, ce qui fait de notre pays le champion du financement des carburants fossiles. La remise à la pompe a atteint 30 centimes par litre de septembre à la mi-novembre. Cette politique a conduit les prix des carburants à être en dessous de leur niveau d’avant-crise avec 1,57€/L en septembre, un niveau jamais vu depuis juillet 2021. A l’inverse, les prix moyens de l’électricité pour les ménages ont atteint leur plus haut niveau en septembre à 0,28 €/kWh.
Pour certains, l’augmentation historique des prix de l’électricité et le semblant de retour à la normale pour les prix du carburant remet en cause le fait que recharger sa voiture électrique serait moins cher que de faire le plein. Et certains se demandent même si cela ne va pas mettre un coup d’arrêt à la transition vers la mobilité électrique. Regardons les faits.
Nous avons comparé le coût d’un trajet de 100 km entre une Peugeot 208 électrique et son homologue essence, car il s’agit des modèles électrique et thermique les plus vendus en 2022 en France. Nous avons pris en compte l’évolution moyenne des prix de l’électricité d’avril à septembre 2022, et l’évolution du prix des carburants.
T&E montre que lorsqu’il s’agit d’une recharge lente à domicile – qui représente l’écrasante majorité des usages -, le coût d’un trajet de 100 km avec une voiture électrique s’élève en moyenne à 4€ entre avril et septembre 2022. Sur la même période, le même trajet en véhicule essence coûte 11,5€, soit quasiment le triple. En septembre, l’écart se réduit en raison de la remise à la pompe de 30 centimes, mais il reste largement à l’avantage de l’électrique (4,4€ vs 9,7€).
Au total, sur une année, l’utilisation d’un véhicule électrique neuf plutôt que thermique représente un gain significatif de pouvoir d’achat de plus de 1 000 euros (700 €/an pour la recharge électrique contre 1 900 €/an pour le plein d’un thermique)[1].
Les évolutions fiscales à venir vont conforter cet avantage économique de l’électrique. D’un côté, le tarif régulé de l’électricité -dont bénéficient la plupart des ménages- va augmenter de 15 % en 2023, et passera donc de 0,18 €/kWh à environ 0,21 €/kWh (ce qui reste en deçà des prix moyens observés cette dernières année). D’un autre côté, la baisse puis la suppression du bouclier tarifaire sur le carburant va se traduire par une hausse du prix à la pompe. T&E a comparé l’impact des deux phénomènes et montre que pour l’électrique, le surcoût sera de 0,4€ pour 100 km. Pour le thermique, le surcoût en 2023 sera de 1,9€ pour 100 km, quasiment cinq fois plus !
Il existe un seul cas de figure où la recharge d’un plein électrique coûte aussi cher qu’un plein de carburant : lorsque cette recharge est effectuée via une borne rapide, située par exemple sur une aire d’autoroute. Or, pour les ménages, ce cas de figure est rare et lié aux déplacements exceptionnels, comme les départs en vacances. La Commission européenne souligne d’ailleurs que 90 % de la recharge s’effectue à domicile ou sur le lieu de travail. De plus, Emmanuel Macron a récemment annoncé que toutes les bornes de recharge – dont celles situées sur la voirie ou dans les copropriétés – seraient intégrées au bouclier tarifaire, ce qui permettra de contenir les prix de la recharge dans toute situation.
Malgré les subventions encore accordées aux véhicules thermiques et la hausse du prix de l’électricité -due à la trop grande dépendance de l’UE aux énergies fossiles- la voiture électrique est actuellement le meilleur choix économique à l’usage. Il est urgent d’accélérer la transition vers le véhicule électrique, pas seulement au nom du climat mais aussi au nom du portefeuille des automobilistes français.
Tribune initialement publiée sur le site des Echos.
Notes
[1] : Pour un véhicule de première main, sur la base de 16 500 km par an, d’après une étude UFC Que Choisir sur le Coût de détention des véhicules. La consommation des véhicules en condition réelle : EV-database pour la Peugeot e-208 et Spritmonitor pour la Peugeot 208 essence.
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